Camille Frison et Marie Dal Zotto

Marie Dal Zotto, 31 ans, qui interprétait le rôle de Laura dans « mention particulière », avec Camille Frison, 22 ans. Camille a obtenu son CAP en 2017. Elle est actuellement en contrat de professionnalisation et travaille au Buffalo Grill de Bourgoin-Jallieu (Photo publiée avec la permission de l’association Chromosome Surprise & Co)

 

En 2019, nous avons mené une enquête en ligne auprès des familles membres de plusieurs groupes d’échanges concernant la trisomie 21 (3 groupes fermés sur Facebook). Cette enquête concernait la scolarisation des enfants porteurs de trisomie 21 (T21) nés entre 1999 et 2016. Entre le 13 et le 26 novembre 2019, 177 parents d’un enfant avec T21 ont répondu à notre questionnaire. Deux questionnaires n’ont pas été retenus. Dans le premier cas, il s’agissait d’un enfant non scolarisé né en 2017. Dans le second cas, il y avait une incohérence apparente entre les différentes réponses au questionnaire.  Nous avons en revanche choisi de retenir un questionnaire rempli pour un enfant avec trisomie 21 né en 1998 mais qui demeure scolarisé. Nous avons donc retenu 175 questionnaires pour analyse.

Dans la plupart des cas (94%), c’est la mère de l’enfant qui a répondu au questionnaire. Les réponses concernent un garçon avec T21 dans 55% des cas et une fille dans 45% des cas. Parmi les 175 répondants:

  • 87 (49,5%) ont un enfant né entre 2013 et 2016 (3-6 ans) : dans la plupart des cas (90%), l’enfant est scolarisé en maternelle (figure 1)
  • 47 (27%) ont un enfant né entre 2009 et 2012 (7-10 ans) : dans la grande majorité des cas (70%) l’enfant est scolarisé à l’école primaire (figure 1)
  • 22 (12,5%) ont un enfant né entre 2004 et 2008 (11-15 ans) : dans cette classe d’âge, il y a un peu plus d’enfants scolarisés en IME (44%) qu’en école ordinaire (41%). 90% des enfants scolarisés en école ordinaire sont au collège (figure 1)
  • 19 (11%) ont un enfant né entre 1998 et 2003 (16-21 ans) : dans la majorité des cas, l’enfant est scolarisé en IME (63%). Seuls 3 enfants porteurs de trisomie 21 (16%) sont scolarisés au lycée ou en CFA.

Ces résultats par classe d’âge apparaissent relativement similaires à ceux de l’enquête menée par Trisomie 21 France en 2017 auprès des familles adhérentes aux associations Trisomie 211.

Il apparait clairement que les réponses reçues ne constituent pas un échantillon représentatif de l’ensemble des enfants avec T21 en âge d’être scolarisés. Ainsi, dans notre enquête, 49,5% des répondants ont un enfant âgé de 3 à 6 ans alors que globalement ces enfants ne représentent qu’environ 24,5% de l’ensemble des enfants avec T21 en âge d’être scolarisés (nous estimons à environ 8600 le nombre d’enfants porteurs de T21 âgés de 3 à 20 ans et à environ 2100 le nombre d’enfants porteurs de T21 âgés de 3 à 6 ans).

On peut néanmoins supposer que les réponses sont représentatives des familles membres des groupes d’échanges concernant la trisomie 21 sur les réseaux sociaux. Il semblerait donc que les parents ayant un enfant relativement jeune sont les plus nombreux et/ou les plus actifs au sein de ces différents groupes.

Modes de scolarisation des enfants avec T21 selon leur classe d'âge
Figure 1

1. La scolarisation des enfants avec T21 en école ordinaire

Parmi l’ensemble des répondants, 129 (près de 74%) ont un enfant scolarisé en école ordinaire. Près de 90% des enfants avec T21 scolarisés en école ordinaire ont un AESH actuellement (AESH individuel, AESH mutualisé et/ou AESH collectif). Dans près de 5% des cas, les parents ont bien reçu une notification d’AESH mais leur enfant n’a pas d’AESH actuellement. Deux répondants sont toujours en attente de notification pour un AESH individuel ou mutualisé. Dans environ 4% des cas, les parents n’ont pas demandé d’AESH. Hors accompagnement par un AESH collectif en ULIS, un seul répondant s’est vu notifié un refus d’attribution d’AESH pour son enfant.

Pour les parents ayant reçu une notification, leur enfant s’est vu attribué un AESH individuel dans 75% des cas et un AESH mutualisé dans 25% des cas.

Seuls 63% des répondants dont l’enfant est scolarisé en école ordinaire (81/129) ont un enfant avec T21 scolarisé à temps plein. Ainsi sur notre échantillon d’enquête, 49% des élèves de maternelle, 88% des élèves scolarisés à l’école primaire, 89% des élèves scolarisés au collège et 100% des élèves scolarisés au lycée ou en CFA sont scolarisés à temps plein.

Selon les chiffres avancés par le gouvernement,  « en 2019, 87% des élèves handicapés sont scolarisés à temps plein » dans le premier degré (école maternelle + école primaire)2. Pour les élèves porteurs de T21 scolarisés dans le premier degré, notre enquête montre que l’on reste apparemment très éloigné de ces chiffres.  En effet, même en redressant notre échantillon (par pondération), nous estimons que seulement 66,5% des élèves porteurs de T21 sont scolarisés à temps plein dans le premier degré. Des associations comme TouPI contestent, par ailleurs, les chiffres avancés par le gouvernement concernant l’ensemble des élèves handicapés3. Une enquête menée en 2019 par TouPI, Autisme France et Info Droit Handicap fait d’ailleurs état de 35% d’élèves handicapés scolarisés à temps partiel4.

1.1. La scolarisation des enfants avec T21 à la maternelle

Parmi l’ensemble des répondants, 81 (46%) ont un enfant avec T21 scolarisé en maternelle. L’âge des enfants varie de 3 à 7 ans. Les temps de scolarisation sont très variables. Seuls 49% des élèves avec T21 sont scolarisés à temps plein en maternelle. Près d’un élève avec T21 sur 3 est scolarisé moins de 15h par semaine. 8% des élèves avec T21 sont scolarisés moins de 10h par semaine (figure 2).

Temps de scolarisation en maternelle
Figure 2

En maternelle, 70 élèves avec T21 sur 81 (86%) ont bien un AESH actuellement. 5 élèves avec T21 (6%) ont bien reçu la notification d’attribution d’un AESH mais n’ont pas d’AESH actuellement. Pour 5 autres élèves (6%), aucune demande d’AESH n’a été faite. Comme évoqué précédemment, seul un répondant s’est vu notifié un refus d’attribution d’AESH au motif que la petite section de maternelle est une « classe de socialisation ». Du fait de l’absence d’AESH, son enfant est scolarisé moins de 5 heures par semaine.

Les temps d’accompagnement par un AESH sont très variables. Environ 47% des élèves bénéficient d’au moins 15h d’accompagnement. Environ 15% des élèves bénéficient au moment de l’enquête de moins de 10h d’accompagnement sans tenir compte des 6% d’élèves pour lesquels aucune demande d’AESH n’a été faite (figure 3).

Nombre d'heures d'AESH en maternelle
Figure 3

Dans 25% des cas, les répondants indiquent que l’école n’accepte pas leur enfant en dehors des heures de présence de l’AESH (figure 4). Les implications de cette « AESH-dépendance » sont multiples : Les élèves dans cette situation sont souvent scolarisés moins que les parents ne le souhaiteraient (temps partiel imposé par l’école); il y a également un risque important que l’enfant ne soit soudain plus accepté à l’école en cas d’arrêt maladie ou de démission de l’AESH ; par ailleurs, cette scolarisation « en pointillé » peut également, suivant les cas, empêcher un parent de reprendre une activité, le forcer à quitter son emploi  ou l’obliger à réduire son activité. Enfin, une telle condition imposée par l’établissement interroge nécessairement sur l’ « approche inclusive » développée par l’établissement.

Une scolarisation AESH-dépendante pour un quart des élèves de maternelle
Figure 4

Comme on l’a déjà évoqué précédemment, seuls 49% des élèves avec T21 en maternelle sont scolarisés à temps plein. Cela ne signifie cependant pas qu’une scolarisation à temps partiel est imposée à 51% des élèves de maternelle. En effet, près d’un tiers des répondants (31%) ont, a priori, choisi de scolariser leur enfant à temps partiel (bien que le nombre d’heures d’AESH attribuées à leur enfant ait aussi pu influer sur leur choix). Les raisons les plus fréquemment invoquées sont les suivantes : afin d’emmener l’enfant à divers rendez-vous (orthophonie, psychomotricité, rendez-vous médicaux), en raison de la fatigabilité de l’enfant, ou choix d’une augmentation progressive du temps de scolarisation. Cependant, pour environ 20% des élèves avec T21, on peut effectivement parler d’une scolarisation à temps partiel imposé : refus d’attribution d’un AESH, absence de l’AESH, nombre d’heures d’accompagnement insuffisant ou refus pure et simple de l’école limitent la scolarisation de ces élèves. Une situation apparait particulièrement absurde : un élève dispose d’au moins 15h d’accompagnement par un AESH individuel, son AESH est bien présent mais l’école refuse de le scolariser même pendant les heures de présence de son AESH. Résultat : cet enfant est aujourd’hui scolarisé moins de 5h par semaine.

Globalement, 74% des répondants sont plutôt d’accord pour dire que cette année scolaire se déroule bien, 73% se déclarent plutôt satisfaits des efforts fournis par l’enseignant pour faciliter l’inclusion de leur enfant et le faire progresser, 85% sont plutôt d’accord pour dire que l’AESH de leur enfant fait du bon travail, 89% sont plutôt d’accord pour dire que leur enfant est heureux à l’école et 86% souhaitent que leur enfant poursuive sa scolarité en école ordinaire l’année prochaine (contre 2% qui ne le souhaitent pas)

A la fin du questionnaire, les parents avaient la possibilité d’ajouter des informations supplémentaires concernant la scolarisation de leur enfant. Très contrastés, leurs témoignages sont riches d’enseignements:

  • « Manque cruellement d’heures d’AVS, du coup pas possible de reprendre le travail. Car horaires d’école de 8h30 à 11h30 »
  • « J’ai rencontré plusieurs directrices d’école avant de trouver celle qui a accepté (mon enfant) sans « mais », c’est une directrice qui est pour l’inclusion et qui l’année dernière avait accepté (mon enfant) même sans AVS. »
  • « 20h d’AVS notifiées, 12h effectives : 4 enfants, 2 AVS ! Nous comptons demander une AVSI pour l’ULIS CP l’année prochaine mais il semble que cela soit très compliqué dans notre département… pourtant cet accompagnement est indispensable à une bonne inclusion en classe ordinaire… Certaines MDPH l’ont bien compris mais ici besoin d’AVSI en ULIS = IME … bref encore de beaux combats en perspective … »
  • « J’aimerais que tous les enfants porteurs de T21 bénéficient du même accueil que ma fille. On a beaucoup de chance! »
  • « Il faut se battre auprès de la cellule AVS pour obtenir un(e) remplaçant(e) lorsque l’AESH est en arrêt maladie. »
  • « Scolarité à temps plein + cantine + un peu de garderie, accueil MERVEILLEUX de la part de l’école ET des services périscolaires de la commune (une personne recrutée spécialement pour l’accueil de notre fils), nous avons énormément anticipé la rentrée avec tous les intervenants, et nous en recueillons les fruits aujourd’hui. Je suis heureuse de pouvoir témoigner que parfois tout va bien. »
  • « L’école n’accepte pas mon enfant sans AVS et ce n’est pas normal ! »
  • « L’équipe éducative de cette école est de façon générale très ouverte aux différences de toutes sortes. Aucun obstacle… »
  • « Que les instits soient plus concernées par la scolarité de l’enfant, qu’elles ne se déchargent pas sur l’AVS qui est là pour aider l’enfant et non assurer son apprentissage dans les différentes activités proposées. Que l’AVS s’occupe de l’enfant lors des rassemblements en groupe pour lui expliquer ce que raconte la maitresse au lieu de remplir des papiers ou un cahier de suivi… »
  • « Pour nous ça se passe super. Pourvu que ça dure comme ça »
  • « Malgré le fait que notre fils soit privilégié par le fait qu’il aille à l’école tous les jours, à temps plein, avec une AVS à temps plein, il n’est en revanche pas inclus. Ainsi nous avons appris récemment qu’il avait sa propre caisse de matériel, qu’il ne faisait pas les mêmes activités que les MS, qu’il suivait un programme de PS, seul avec son AVS, qu’il n’allait pas avec les MS en motricité mais avec les PS, qu’il n’était pas obligé de rester aux temps de regroupement avec les autres, etc. La maîtresse et l’AVS sont bienveillantes et très gentilles mais n’ont pas d’ambition pour lui, aucune exigence. Elles n’ont pas compris que l’inclusion, c’était de faire les mêmes choses, avec tous les autres de sa classe de MS, au même moment, aidé par son AVS pour les choses qu’il ne peut pas réussir seul. Elles n’ont pas compris qu’un enfant avec une trisomie 21 apprenait beaucoup par observation des autres et mimétisme sur une longue période de temps. Aussi notre fils est-il intégré à la classe, mais pas inclus. »
  • « Nous souhaitons une orientation ULIS pour le CP, peut-être avec AESH individuel. Cette année se déroule plutôt bien après 2 ans de grosses galères : enseignante bornée, bataille MDPH pour un deuxième maintien en grande section, AESH non impliquée. Chaque nouvelle année est malheureusement une bataille à recommencer en fonction de l’enseignant, de l’AESH, de la MDPH sans compter les inspecteurs d’académie qui appliquent des règles sans tenir compte des lois… »
  • « Nous avons beaucoup de chance avec une directrice d’école très inclusive et qui ne fait aucune différence entre les enfants. Elle est également l’institutrice de notre fille qu’elle a acceptée sans demander d’AVS et ce à temps plein. Tout est une question de personnes !!! Nous sommes chanceux, pour le moment ! »
  • « Depuis le début d’année, mon enfant a changé 3 fois d’AESH, selon moi lié au manque de formations, de moyens et de reconnaissance de ce personnel pourtant indispensable dans certains cas à une possible inclusion. »
  • « Ça se passe super bien, il est content d’aller à l’école. »
  • « J’ai obtenu la scolarisation à temps plein au bout de 5 réunions avec l’équipe éducative et à la suite d’un courrier envoyé à la mairie car la directrice ne voulait pas de scolarisation à temps plein si pas d’AVS à temps plein. »
  • « On a la chance d’être tombés sur une école et une équipe au top, très ouverte et voulant tout faire pour inclure au maximum notre enfant »

1.2. La scolarisation des enfants avec T21 à l’école primaire

Parmi l’ensemble des répondants, 36 (21%) ont un enfant entre 6 et 11 ans scolarisé à l’école primaire. 88% des élèves avec T21 sont scolarisés à temps plein (32/36). Pour 6% des élèves (2/36) on peut parler d’une scolarisation à temps partiel imposé avec une scolarisation de moins de 15h par semaine. Dans les 2 cas restants, il s’agit d’un choix des parents et l’enfant est scolarisé au moins 15h par semaine.

24 élèves sur 36 (67%) sont scolarisés en ULIS école. Les 33% restants (12/36) sont scolarisés en classe ordinaire.

Parmi les élèves scolarisés en classe ordinaire, les temps d’accompagnement par un AESH sont extrêmement variables. Compte tenu de cette grande variabilité pour des élèves ayant le même handicap et bien que les capacités des enfants avec trisomie 21 puissent être très variables, on peut raisonnablement se demander si le nombre d’heures d’AESH attribuées correspond bien aux besoins de l’élève ou si ces heures sont attribuées de manière totalement arbitraire par les MDPH. 50% des élèves avec T21 en classe ordinaire bénéficient d’un AESH au moins 15h par semaine (figure 5).

Temps d'accompagnement par un AESH en classe ordinaire
Figure 5

Parmi les élèves scolarisés en ULIS école, 75% sont accompagnés uniquement par un AESH collectif et 17% des élèves sont accompagnés uniquement par un AESH individuel (au moins 15h par semaine). Deux répondants ont fait une demande d’AESH alors que leur enfant bénéficie d’un accompagnement par un AESH collectif. L’un d’entre eux a bien obtenu un AESH individuel pour son enfant (moins de 10h par semaine) et pour l’autre élève, les parents attendent encore la notification afin de permettre à l’enfant de pouvoir manger à la cantine et d’être scolarisé à temps plein. Cela confirme donc qu’il est bien possible, en principe, de faire une demande d’AESH pour un élève en ULIS.

Globalement les parents dont l’enfant est scolarisé à l’école primaire ont un taux de satisfaction plus important que les parents dont l’enfant est en maternelle. Ainsi, 78% des répondants sont plutôt d’accord pour dire que cette année scolaire se déroule bien, 78% sont plutôt satisfaits des efforts fournis par l’enseignant pour faciliter l’inclusion de leur enfant et le faire progresser, 83% sont plutôt d’accord pour dire que l’AESH de leur enfant fait du bon travail, 94% (33/35) sont plutôt d’accord pour dire que leur enfant est heureux à l’école et 94% (34/36) souhaitent que leur enfant poursuive sa scolarité en école ordinaire l’année prochaine (seul deux répondants sur 36 se déclarent incertains).

Si la scolarisation des élèves avec T21 semble globalement moins compliquée à l’école primaire qu’en maternelle avec notamment une scolarisation à temps plein enfin possible pour la plupart des élèves, certains témoignages de parents indiquent néanmoins qu’ils ont dû batailler pour en arriver là et que certaines difficultés perdurent au-delà de la maternelle (temps d’accompagnement par un AESH insuffisant, batailles avec les MDPH ou avec l’école) ; d’autres témoignages évoquent des expériences plus positives:

  • « Mon enfant est beaucoup mieux depuis son entrée en CP ULIS et se sent à sa place avec des élèves qui ne la repousse pas. »
  • « J’aimerais que son AESH soit à temps plein et individuelle »
  • « Très long combat. »
  • « Une AVS individualisée est nécessaire mais refus de la MDPH car notification d’IME et en ULIS et 1 ou 2 demi-journée en IME est à l’étude pour l’année prochaine. »
  • « L’école ne met pas en place les compensations prévues et identifiées. »
  • « L’inclusion est un vrai combat malheureusement. »
  • « Chaque année, on ne sait pas si l’école acceptera de l’accompagner l’année suivante. »
  • « Maternelle compliquée et ULIS au top mais peu de places. »
  • « L’école en milieu ordinaire apporte énormément à notre fils tant sur le plan des apprentissages qu’au niveau relationnel et humain et, pour l’école, c’est une vraie chance d’ouverture aux autres et à la différence. Chaque année, chaque jour est un nouveau défi, l’implication des personnes peut être très variable. Il faut se battre pour que chacun accepte de découvrir et reconnaisse les compétences de notre enfant, lui laisse du temps, mette en place d’autres approches d’enseignement… »
  • « Nous avons beaucoup galéré pour trouver l’école ouverte à notre enfant et sommes très heureux de l’avoir trouvée ! »
  • « Remarquable travail d’inclusion de la classe ULIS dans l’école où elle est. Instit et AVS au top! »
  • « Nous avons beaucoup de chance cette année car enseignante et AESH vraiment top. Nous espérons que notre fils puisse intégrer la classe ULIS qui se trouve dans son école l’année prochaine. »
  • « Tout se passe bien pour notre fille, il faut le dire quand c’est bien. »

1.3. La scolarisation des enfants avec T21 au collège

Parmi l’ensemble des répondants, 9 (5%) ont un enfant entre 11 et 15 ans scolarisé au collège. Si ce nombre parait faible, c’est en partie parce que relativement peu de parents ayant un enfant avec T21 entre 11 et 15 ans ont répondu au questionnaire. Ainsi, dans notre enquête, on compte quand même 41% d’enfants avec T21 entre 11 et 15 ans scolarisés au collège (9/22) soit presque autant qu’en IME (10/22).

Au collège, 89% des élèves avec T21 sont scolarisés à temps plein (8/9). Pour l’élève restant, il s’agit d’un choix des parents. L’enfant est scolarisé moins de 15h par semaine et suit des cours particuliers par ailleurs.

Un seul élève avec T21 est scolarisé en classe ordinaire (en troisième), les 8 autres élèves sont scolarisés en ULIS collège (de la 6e à la 3e). Parmi ces 9 élèves, 4 (44%) sont accompagnés uniquement par un AESH collectif et 3 (33%) sont accompagnés uniquement par un AESH individuel (au moins 20h par semaine pour 2 d’entre eux). Un élève est accompagné uniquement par un AESH mutualisé (moins de 15h par semaine), et enfin un élève bénéficie d’un accompagnement par un AESH collectif et un AESH mutualisé (moins de 10h par semaine).

Globalement les répondants dont l’enfant est scolarisé au collège ont un taux de satisfaction plus faible que ceux dont l’enfant est scolarisé à l’école primaire. Ainsi, 67% des répondants sont plutôt d’accord pour dire que cette année scolaire se déroule bien, 67% sont plutôt satisfaits des efforts fournis par les enseignants pour faciliter l’inclusion de leur enfant et le faire progresser, 86% (6/7) sont plutôt d’accord pour dire que l’AESH de leur enfant fait du bon travail, 89% sont plutôt d’accord pour dire que leur enfant est heureux à l’école et 89% (8/9) souhaitent que leur enfant poursuive sa scolarité en école ordinaire l’année prochaine (seul un répondant sur 9 se déclare incertain).

A titre d’hypothèses, on peut avancer plusieurs explications pour expliquer cette baisse de satisfaction apparente : elle pourrait tout d’abord être liée à un faible temps d’inclusion des élèves en ULIS dans leur classe de référence. A l’inverse, en cas de temps d’inclusion important dans la classe de référence, la multiplicité des enseignants peut rendre plus difficile la communication et la concertation entre parents et enseignants ce qui peut également être source d’insatisfaction. Par ailleurs, dans ce cas, les enseignants n’ayant l’enfant dans leur classe que quelques heures par semaine, on peut penser que leur implication pour favoriser l’inclusion de leur élève avec T21 est peut-être moins importante que celle des enseignants de l’école primaire qui suivent l’enfant toute la journée. Cette baisse de satisfaction pourrait également provenir du décalage grandissant entre les aptitudes des élèves avec T21 et celles des autres élèves. Enfin, elle pourrait simplement venir d’un biais de notre enquête lié au faible nombre de réponses concernant des enfants avec T21 scolarisés au collège. A l’avenir, il conviendra d’adapter ce questionnaire afin de tester ces hypothèses.

Relativement peu de parents (3/9) ont souhaité fournir plus d’informations concernant la scolarisation de leur enfant. Voici leurs témoignages :

  • « Le parcours de mon enfant en ordinaire n’est dû qu’à notre volonté de parents et à celle de quelques rares professeurs. Si la loi n’obligeait pas le passage et le suivi de la scolarité jamais il n’aurait eu accès au collège. Pourtant tout se passe bien dans ce collège ou il est en 6e ULIS avec inclusion complète dans sa classe de référence. L’inclusion complète étant une volonté de l’équipe enseignante pour tous les élèves porteurs de handicap. Nous avons fait plusieurs portes ouvertes avant de demander ce collège et les différences d’accueil et les modalités d’enseignements sont très inégales. Nous avons éliminé d’office certains établissements dans lesquels notre fils aurait été rejeté. Heureusement que nous avons trouvé celui où il a été affecté, tout y est fait pour qu’il soit intégré et s’y sente bien. Mon fils adore aller au collège. »
  • « Enfant heureux d’avoir toujours été en milieu ordinaire. »
  • « Que de batailles, de combats, de demandes répétées et d’interlocuteurs contactés pour en arriver là! C’est épuisant et injuste »

1.4. La scolarisation des enfants avec T21 au lycée

Parmi l’ensemble des répondants, seuls 3 (moins de 2%) ont un enfant âgé entre 16 et 20 ans scolarisé au lycée ou en CFA (centre de formation d’apprentis). Ils ne représentent que 16% des répondants ayant un enfant âgé entre 16 et 20 ans. A cet âge, en effet, la grande majorité des répondants ont un enfant avec T21 qui est en IME (12/19 soit 63%). Une élève est en première ULIS dans un lycée professionnel, prépare un bac pro Gestion – Administration et bénéficie d’un accompagnement par un AESH individuel au moins 20h par semaine. Une autre élève est en dernière année de CAP et bénéficie d’un accompagnement par un AESH individuel au moins 15h par semaine. Enfin, un troisième élève est en ULIS Pro et passerelle handicap dans un CFA et bénéficie d’un accompagnement par un AESH collectif.

Les 3 répondants sont d’accord pour dire que la scolarisation de leur enfant se passe bien et sont également plutôt satisfaits des efforts fournis par les enseignants pour faciliter l’inclusion de leur enfant et le faire progresser. Ils sont aussi plutôt d’accord pour dire que l’AESH de leur enfant fait du bon travail. Les 3 répondants indiquent qu’ils sont plutôt d’accord pour dire que leur enfant est heureux à l’école et les 2 répondants ayant un enfant dont la scolarité ne sera pas encore terminée à la fin de l’année scolaire souhaitent que leur enfant poursuive sa scolarité en école ordinaire l’année prochaine.

Les 3 répondants ont souhaité fournir plus d’informations concernant la scolarisation de leur enfant:

  • « Notre fille a connu plusieurs établissements dans deux régions différentes. De l’école publique de petit village au très gros collège privé. Elle est actuellement dans un lycée professionnel et bénéficie d’une inclusion presque totale avec intégration en ULIS. »
  • « Notre fille est en dernière année (de CAP), à partir de juillet elle sera sur le monde du travail! »
  • « (Mon fils) a toujours été en école ordinaire : classe ordinaire avec AVS à mi-temps jusqu’au CM1 (sans en avoir le niveau), ULIS collège puis ULIS lycée. L’an prochain, il rejoindra peut-être un CAP et validera la partie pratique (on verra pour la partie théorique…. Ce n’est pas gagné !). Pour moi, nous vivons tous dans le même monde et ça commence à l’école… Je m’étonne de voir plus d’enfants T21 virés de l’école ordinaire aujourd’hui que lorsque (mon fils) était petit. En tous cas, tous les enfants T21 que je connais et qui étaient en classe ordinaire savent lire et écrire (même si ce n’est pas fluide). Ce n’est pas le cas des enfants en IME. »

2. La scolarisation des enfants avec T21 en IME (ou en IES)

Parmi l’ensemble des répondants, 35 (20%) ont un enfant entre 5 et 21 ans scolarisé en IME. La majorité de ces enfants ont intégré l’IME entre 5 et 7 ans (figure 6). Leur âge moyen d’entrée en IME était ainsi d’environ 8 ans.

Ces chiffres, toutes classes d’âge confondues (et qui concernent, rappelons-le, des répondants dont la plupart ont un enfant encore relativement jeune) ne doivent pas être utilisées pour formuler des généralisations hâtives. Ainsi, ces chiffres ne signifient pas, par exemple, que la majorité des enfants porteurs de T21 entrent à l’IME avant l’âge de 8 ans. Pour une meilleure compréhension et interprétation de ces données, il est préférable d’opérer des comparaisons par classe d’âge. Ainsi sur l’ensemble des répondants, 26,7% (4/15) des enfants nés entre 2000 et 2003 étaient déjà scolarisés en IME à l’âge de 8 ans. Il en était de même pour 23,8% (5/21) des enfants nés entre 2004 et 2007 et 20,6% (7/34) des enfants nés entre 2008 et 2011.  A défaut d’être véritablement spectaculaire, cette évolution parait indicative d’une volonté croissante de plus en plus de parents de se battre pour l’inclusion de leur enfant en milieu ordinaire ainsi que d’une augmentation tendancielle de la proportion d’enfants avec T21 scolarisés en école ordinaire à un âge donné.

Age d'entrée à l'IME
Figure 6

Les raisons les plus souvent invoquées par les parents pour expliquer la scolarisation de leur enfant en IME sont:

  1. Une école ordinaire qui n’était pas adaptée aux besoins de leur enfant avec en particulier un manque de formation des enseignants et des AESH (26%) ;
  2. Les capacités de l’enfant avec une lenteur ou un retard dans les apprentissages considérés comme trop importants par rapport aux autres enfants (23%) ;
  3. Un refus de maintien en école ordinaire par la MDPH et/ou l’école (17%) ;
  4. Un enfant en souffrance et/ou mis à l’écart en école ordinaire (11%)
  5. En raison d’un handicap visuel en plus de la trisomie 21 (6%). Un répondant indique d’ailleurs que son enfant est scolarisé en IES (Institut d’Education Sensorielle) plutôt qu’en IME.

Globalement, 80% des répondants dont l’enfant et en IME se déclarent plutôt satisfaits des conditions de scolarisation actuelle de leur enfant, et 66% sont plutôt d’accord pour dire que leur enfant est plus sociable et épanoui depuis son entrée à l’IME.  Toutefois de nombreux parents (environ 20%) évoquent spontanément (c’est à dire sans même que la question ait été posée dans le questionnaire) un manque d’apprentissages scolaires à l’IME. Cela confirme une critique récurrente adressée aux IME et on peut penser que si cette question avait été posée directement, une plus grande proportion de répondants aurait évoqué ce manque d’apprentissages scolaires. Les répondants dont l’enfant est en IME sont également nombreux à regretter que leur enfant n’ait pas poursuivi sa scolarité en milieu ordinaire (49% des répondants expriment des regrets contre 37% qui ne regrettent pas)

Les avis des parents sont donc très partagés. Certains parents sont très positifs concernant l’IME (« Ma fille évolue bien et plus vite depuis qu’elle est dans son IME avec un enseignement adapté et une classe peu nombreuse contrairement au milieu ordinaire. » ; « Accepter sa réorientation en IME est la meilleure décision que nous ayons prise. » ; « La prise en charge en IME est satisfaisante. La seule chose que j’ai à leur reprocher est le manque des apprentissages scolaires … pas assez ! Ceci dit ma fille s’épanouit bien depuis son entrée à ses six ans.  J’ai moi-même fait le choix de l’inscrire en IME ayant remarqué que l’école ordinaire ne répondait pas à ses besoins ! » ; « Ma fille est beaucoup plus épanouie qu’avant, elle évolue à son rythme et a fait plus de progrès en 6 mois à l’IME qu’en 2 ans et demi à l’école classique, elle parle encore mieux qu’avant alors qu’elle parlait déjà très bien, à moins peur des autres enfants et s’intègre très bien ») alors que d’autres se montrent plus critiques (« Actuellement, en IME, 1h de classe par semaine sachant qu’elle y va du lundi au vendredi » ; « Je regrette que dans le groupe des ados on abandonne les cours car ma fille ne sait pas lire » ; « Personnellement je regrette d’avoir suivi le choix des  professionnels pour l’orientation en IME »).

A travers un certain nombre de témoignages, on voit également apparaitre en filigrane un plaidoyer pour une école réellement inclusive (« Le système n’est pas au point. Malgré la déficience intellectuelle, notre fils aime apprendre et aurait donc dû pouvoir connaitre une scolarité plus concrète. Même si cela n’a pas pu être le cas pour notre fils, je reste persuadée que la coexistence est  la seule voie pour éduquer à la différence, au handicap… » ; « Je pense que tant que l’éducation nationale et l’Etat ne mettrons pas les moyens, on ne pourra pas accueillir correctement nos enfants en école ordinaire. » ; « Bon nombre de maîtres et maîtresses ont encore du mal avec le handicap et son acceptation, la différence de nos jours fait encore peur » ; « En colère du milieu scolaire normal, honteux de ce rejet parce qu’un enfant est différent. Inacceptable. »). Il apparait ainsi que pour beaucoup de parents, la scolarisation en IME est avant tout un choix par défaut. C’est, semble-t-il souvent, une réponse adaptée aux défaillances du modèle inclusif à la française plutôt qu’aux véritables besoins des enfants porteurs de trisomie 21.

3. L’instruction en famille (IEF) des enfants avec trisomie 21

Parmi l’ensemble des répondants, seuls 3 (moins de 2%) ont un enfant (entre 7 et 16 ans) instruit en famille. L’un de ces enfants, aujourd’hui âgé de 16 ans, a toujours été instruit en famille pour raisons de santé. Pour un autre enfant instruit en famille depuis 5 ans, ce choix a été fait à l’âge 10 ans après un parcours en Ulis Ecole. Selon sa mère, ce choix résulte de l’absence d’aménagements adaptés et de la non prise en considération des capacités et des besoins de son enfant (« Il ne suffit pas que l’enfant soit accepté il faut un accompagnement adapté, des aménagements pédagogiques personnalisés, et un encadrement bienveillant. L’école doit être garant de la sécurité morale et physique de l’enfant »). Les parents de ces deux enfants ne considèrent pas que l’IEF nuit à la socialisation de leur enfant. Enfin, un enfant âgé de 7 ans suit l’IEF depuis la rentrée 2019 car sa mère n’a apparemment pas eu d’autre choix (« le rejet c’est ce qu’il y a de pire et le personnel non formé »). Elle espère qu’à l’avenir son enfant pourra à nouveau être scolarisé en école ordinaire et considère que l’IEF nuit à la socialisation de son enfant (peut-être parce que dans le cas de son enfant l’IEF est une expérience encore récente et perçue comme transitoire et que donc des alternatives à la socialisation par l’école n’ont pas encore été mises en place). Globalement, selon ces 3 répondants, l’IEF se passe plutôt bien.

4. Les enfants avec trisomie 21 non-scolarisés ou déscolarisés

Parmi l’ensemble des répondants, 8 (près de 5%) indiquent que leur enfant n’est pas scolarisé. Parmi eux, 2 ne sont pas encore scolarisés en raison de leur jeune âge (tous 2 nés en 2016). Dans un cas, les parents ont demandé une dérogation et dans l’autre cas, l’enfant va à la crèche. Un autre enfant né en 2015 n’a quant à lui pu être scolarisé faute d’AESH. 5 autres enfants nés entre 2001 et 2009 ont été déscolarisés pour diverses raisons après un parcours en milieu ordinaire ou en IME (« Ils ne le veulent plus, il voulait que je le mette en IME, pas d’accord, donc je le garde à la maison il fait du SESSAD 2 fois par semaine 1h à chaque fois. Je suis contente de garder mon fils car je n’en pouvais plus de ces écoles, il a même pas appris les couleurs. Nous, on lui apprend tout et c’est très bien comme ça ; « Incompatible avec l’IME de notre ville qui ne propose plus des prises en charge adaptées à ses besoins » ; « l’école de notre village n’était pas handi-accueillante. L’école nous a eu à l’usure, nous avons décidé de cesser le combat de l’inclusion » ; « Maltraitance en institution. Evacué du système scolaire »).

5. Estimation du nombre d’élèves avec T21 selon le mode de scolarisation

Comme nous l’avons déjà souligné, les réponses à notre enquête ne constituent pas un échantillon représentatif de l’ensemble des enfants avec T21 en âge d’être scolarisés. Le nombre de réponses pour certaines classes d’âge est également limité. Malgré ces limitations, on peut tout de même tenter d’extrapoler les résultats de cette enquête pour estimer de manière assez approximative le nombre d’enfant avec T21 selon le mode de scolarisation.

Pour cela, nous disposons d’une estimation relativement fiable du nombre d’enfants en âge d’être scolarisés (âgés entre 3 et 20 ans) basée essentiellement sur une extrapolation des données disponibles sur Eurocat5. Si l’on suppose que les modes de scolarisation par classe d’âge obtenus dans notre enquête (figure 1) sont similaires à ceux de l’ensemble de la population concernée, nous pouvons alors estimer le nombre d’enfant avec T21 par type d’établissement.

Avec un nombre d’enfants porteurs de T21 en âge d’être scolarisés estimé à 8600 (dont environ 2100 ayant entre 3 et 6 ans, 2100 ayant entre 7 et 10 ans, 2400 ayant entre 11 et 15 ans et 2000 ayant entre 16 et 20 ans), nous estimons qu’environ 2017 d’entre eux sont en maternelle (23%), 1632 à l’école primaire (19%), 982 au collège (11%), 316 au lycée ou en CFA (4%), 2853 en IME (33%), 542 ne sont pas ou plus scolarisés (6%) et 259 font l’IEF (3%).

Si l’on suppose maintenant que les parents qui échangent et partagent leurs expériences sur les réseaux sociaux sont peut-être plus militants que la moyenne des parents d’enfants avec T21, on peut dire que ces chiffres représentent peut-être une surestimation du nombre d’enfants avec T21 scolarisés en école ordinaire (4947/8600 soit environ 57,5%)

6. Approche prospective : combien coûterait une école réellement inclusive pour tous les enfants avec T21?

6.1. Combien coûte actuellement la scolarisation des enfants avec trisomie 21 ?

Maintenant que nous avons une estimation du nombre d’enfants avec T21 scolarisés dans chaque type d’établissement, nous pouvons estimer le coût total de scolarisation des enfants avec T21 dans le système actuel.

Pour estimer le coût total, nous posons quelques hypothèses simplificatrices :

  • Les élèves avec T21 disposent actuellement d’un AESH environ 15h par semaine (hypothèse qui parait relativement réaliste sachant que 47% des élèves de maternelle et 50% des élèves d’école primaire dispose d’au moins 15h d’accompagnement par semaine)
  • Le coût de scolarisation en ULIS est équivalent au coût de scolarisation en classe ordinaire avec 15h d’accompagnement par un AESH (nous n’avons pas trouvé de données concernant le coût de scolarisation en ULIS)
  • Nous supposons que pour 15h d’accompagnement, le coût total d’un AESH (salaire et charges) est d’environ 750 euros par mois et que le coût annuel est de 7500 euros (750 euros x 10 mois).

Nous savons par ailleurs que:

  • La dépense moyenne par élève de maternelle est d’environ 6800 euros6
  • La dépense moyenne par élève d’école primaire est d’environ 6400 euros6
  • La dépense moyenne par élève de collège est d’environ 8710 euros6
  • La dépense moyenne par élève de lycée professionnel est d’environ 12730 euros6
  • Le coût annuel moyen d’une place en IME est d’environ 39000 euros7

Compte tenu de ces éléments, nous pouvons à présent estimer le coût total de scolarisation des élèves avec T21 dans le système actuel:

Coût total de scolarisation des enfants avec T21 actuellement = 2017 (6800 + 7500) + 1632 (6400 + 7500) + 982 (8710 + 7500) + 316 (12730 + 7500) + 2853 x 39000 = 28 843 100 + 22 684 800 + 15 918 220 + 6 392680 + 111 267 000 = 185 105 800 euros

Le coût moyen par enfant porteur de T21 scolarisé en établissement est donc d’environ 23 734 euros. Malgré ce coût élevé, nous savons qu’environ 6% des enfants sont déscolarisés, que 3% des parents choisissent ou sont contraints de choisir l’IEF, que de nombreux enfants sont scolarisés à temps partiel en raison d’un nombre d’heures d’accompagnement insuffisant, et que de nombreux parents choisissent de faire entrer leur enfant en IME en raison du manque d’aménagements adaptés proposés en école ordinaire ainsi que du manque de formation des enseignants et des AESH.

6.2. Combien coûterait une école inclusive pour les enfants avec T21?

Dans un premier temps, on considèrera l’école inclusive comme un système qui permettrait de scolariser l’ensemble des 8600 enfants porteurs de T21 en classe ordinaire (sauf opposition des parents) avec une garantie de 20h d’accompagnement par un AESH individuel chaque semaine. Nous supposons que pour 20h d’accompagnement, le coût total d’un AESH (salaire et charges) est d’environ 1000 euros par mois et que le coût annuel est de 10000 euros (1000 euros x 10 mois).

Nous pouvons à présent estimer le coût total d’une école inclusive pour les enfants avec T21 :

Coût total de scolarisation de l’ensemble des enfants avec T21 en classe ordinaire = 2100 (6800 + 10000) + 2100 (6400 + 10000) + 2400 (8710 + 10000) + 2000 (12730 + 10000) = 35 280 000 + 34 440 000 + 44 904 000 + 45 460 00 = 160 084 000 euros

On voit donc qu’une école inclusive avec 100% d’intégration en classe ordinaire et un accompagnement plus important des enfants avec T21 par un AESH serait moins coûteuse (18 614 euros par élève avec T21) que le système actuel.

Toutefois, ce nouveau système ne règlerait pas tous les problèmes : manque de formation des enseignants et des AESH, manque d’aménagements adaptés, etc. Pour cette raison, il semblerait souhaitable d’utiliser l’intégralité des 25 millions d’euros économisés chaque année grâce à cette école plus inclusive pour tenter de créer les conditions d’une école réellement inclusive. Chaque année, cette somme pourrait ainsi permettre de financer des aménagements adaptés (adaptation des programmes avec des objectifs différenciés selon les élèves, élaboration de guides et d’outils pratiques  à destination des enseignants afin d’encourager une démarche de différenciation pédagogique en classe et permettre ainsi aux enseignants de mieux gérer l’hétérogénéité des élèves, rédaction de manuels scolaires en facile à lire et à comprendre, etc.), de former enseignants et AESH aux spécificités des élèves avec T21, d’augmenter encore le nombre d’heures d’accompagnement pour les élèves qui auraient besoin d’un accompagnement plus important, ou encore d’attribuer des primes aux AESH et enseignants ayant suivi certaines formations spécifiques, etc.

Bref, une école réellement inclusive ne coûterait pas nécessairement plus cher qu’aujourd’hui. C’est d’ailleurs ce que montre l’exemple de l’Italie8. On constate également que cette école réellement inclusive ne pourrait pas non plus coûter beaucoup moins cher qu’aujourd’hui. Il faut donc veiller à ne pas laisser se développer, sous prétexte de rendre l’école plus inclusive, une « inclusion au rabais »9.

7. Conclusion

Il existe encore trop peu d’enquêtes sur la scolarisation des enfants porteurs de T21 et il est extrêmement difficile de mesurer les progrès de l’inclusion pour les enfants avec T21 sans avoir de données sur lesquelles se baser pour pouvoir réaliser des comparaisons dans le temps. L’objectif principal de cette enquête était donc avant tout de dresser un état des lieux de la scolarisation des enfants avec trisomie 21.

Cette enquête a permis de montrer qu’entre 3 et 10 ans, une très large majorité d’enfants avec T21 sont scolarisés en milieu ordinaire (école maternelle et école primaire) et que la tendance semble être à une augmentation de la proportion d’enfants avec T21 scolarisés en milieu ordinaire. Pour ces enfants et leurs parents, l’école dite « inclusive » reste néanmoins source de nombreuses difficultés en particulier en maternelle mais aussi par la suite : temps partiel imposé, temps d’accompagnement par des AESH souvent insuffisant, manque de formation des enseignants et des AESH, batailles avec les MDPH, etc.

Entre 11 et 20 ans, les enfants avec T21 en école ordinaire deviennent progressivement de plus en plus minoritaires. Même si l’on observe que le taux de satisfaction des parents dont l’enfant est en IME est comparable à celui des parents dont l’enfant est en école ordinaire, pour beaucoup d’entre eux, la scolarisation en IME semble être un choix par défaut. De fait, 49% d’entre eux regrettent que leur enfant n’ait pas poursuivi sa scolarité en école ordinaire (contre 37% qui ne le regrettent pas). De nombreux parents regrettent également le manque d’apprentissages scolaires en IME.

Maintenant que nous disposons d’un point de référence concernant la scolarisation des enfants avec T21 pour l’année 2019, nous prévoyons de mener cette enquête de façon régulière (tous les 3 ou 5 ans) afin de permettre des comparaisons dans le temps et de pouvoir déterminer si l’école devient réellement plus inclusive pour les enfants porteurs de T21.

Ces enquêtes ultérieures permettront également d’améliorer le questionnaire afin d’approfondir notre compréhension de la scolarisation des enfants avec T21 : par exemple, en ULIS, quel est en moyenne le temps d’inclusion dans la classe de référence ? Selon les parents, ces temps d’inclusion sont-ils insuffisants ou au contraire trop importants ? En IME, combien d’heures par semaine sont en moyenne consacrées à des apprentissages scolaires ? En IME, les enfants avec T21 sont-ils tous amenés à suivre une formation professionnelle ? Quels sont les types de formations proposées ? Selon les parents, ces formations sont-elles de qualité ? Etc.

Nous espérons que cette enquête pourra être utile aux parents d’enfants porteurs de T21 ainsi qu’aux associations défendant les droits des personnes en situation de handicap.

Références

1 Trisomie 21 France. La scolarisation des élèves en situation de handicap: l’avis des familles adhérentes des associations Trisomie 21, Septembre 2017

2 Jean-Michel Blanquer. École inclusive : la dynamique est lancée, 4 novembre 2019

 3 TouPI. 87% des élèves handicapés scolarisés à temps plein ? On va vous expliquer pourquoi c’est faux, 8 novembre 2019

 4 TouPI, Autisme France, Info Droit Handicap. Synthèse de l’enquête Rentrée 2019 : avec ou sans AESH ? (voir P16), septembre 2019

 5 Remi Bertrand. Combien y a-t-il de personnes porteuses de trisomie 21 en France?, 28 mars 2018

 6 Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse. Le coût d’une scolarité, Octobre 2019

 7 Franck Seuret. Combien coûte une place dans un établissement pour personnes handicapées ?, 22 août 2018

 8 Entretien avec Olivier Paolini. Ecole inclusive: Ce que nous apprend l’Italie, 7 mai 2018

 9 Unapei. NON à une inclusion au rabais pour les élèves handicapés, 14 juin 2019

 

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2 années il y a

[…] La scolarisation des enfants porteurs de trisomie 21 en France – trisomie21.org. Marie Dal Zotto, 31 ans, qui interprétait le rôle de Laura dans « mention particulière », avec Camille Frison, 22 ans. Camille a obtenu son CAP en 2017. Elle est actuellement en contrat de professionnalisation et travaille au Buffalo Grill de Bourgoin-Jallieu (Photo publiée avec la permission de l’association Chromosome Surprise & Co) En 2019, nous avons mené une enquête en ligne auprès des familles membres de plusieurs groupes d’échanges concernant la trisomie 21 (3 groupes fermés sur Facebook). […]